Vision pour 2024 de Thierry Marx : reprenons le contrôle

Pour commencer, je tiens à adresser mes voeux les plus sincères et chaleureux aux professionnels de l’hôtellerie-restauration et du tourisme. Que l’année 2024 soit synonyme de joie, d’innovations et de collaborations fructueuses pour le bien de nos entreprises et de notre pays.

Depuis une décennie, notre secteur, c’est l’histoire d’une réinvention permanente.

Nous avons fait face aux défis sécuritaires, sanitaires, à la concurrence déloyale, à l’évolution du travail et aux difficultés de recrutement.
Pour l’heure, nos entreprises traversent des turbulences liées à l’inflation du coût des matières premières, à la hausse des prix de l’énergie et de l’eau.
Elles s’engagent de surcroît dans un processus de transformation, pour engager leur mutation écologique et numérique.
La transition écologique repose sur la prise de conscience de la fin des ressources exploitables et de l’empreinte environnementale issue notamment de notre consommation énergétique, et de notre usage de l’eau. Aucune activité n’échappera à son devoir d’adaptation, a fortiori la nôtre.

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La transition numérique, résulte d’innovations techniques, d’analyses des données, de nouveaux modes d’action et d’interaction, avec entre autres l’introduction de l’intelligence artificielle. Là encore, la digitalisation de nos activités est croissante et s’amplifiera avec l’IA : nous devons être en mesure de nous approprier rapidement cette opportunité : pour satisfaire nos clients, nous permettre de travailler autrement, et nous aider à décider, tous les outils sont bienvenus pour peu qu’ils aient été travaillés avec nous, et qu’ils répondent à nos besoins.

C’est pourquoi, j’ai tracé en novembre dernier lors du congrès de l’UMIH à Angers, une feuille de route ambitieuse pour notre profession avec des résolutions cruciales pour accompagner nos établissements en 2024.

Il est en jeu de « reprendre le contrôle » face à la domination des géants de l’Internet qui transforme nos établissements en de simples prestataires à leur service.

Ces plateformes investissent massivement dans toutes les étapes de l’intermédiation : depuis la promotion de nos offres jusqu’à leur achat et leur paiement, en passant par la comparaison, la réservation, la notation de nos hôtels et de nos restaurants.

Rappelons que c’est bien de la dynamique économique de notre secteur dont dépend le modèle économique de ces plateformes. Leur objectif est clair : capter une part significative de notre marge. La rentabilité nette en restauration est de 2 % alors que ces géants affichent, en comparaison, des ratios à deux chiffres avec des profits se comptant en milliards.

Continuer sur cette voie, ce serait accepter un déclin inexorable.

Nous devons oser une nouvelle manière de faire et de réfléchir !
Il est temps de défendre notre identité, de promouvoir nos établissements et de valoriser nos atouts, en créant une expérience novatrice pour notre secteur.

La question est d’ouvrir la voie, pour développer une alternative à ces plateformes. Car je crois que la solution réside dans l’union. L’hôtellerie restauration représente environ 170 000 établissements et 1,1 millions de salariés ; et nous sommes deux fois plus si nous regardons le secteur du tourisme dans son ensemble. Regroupons-nous pour faire valoir la force du nombre.

Pourquoi le faire aujourd’hui ?

Parce que nous vivons une nouvelle révolution technologique fondée sur l’intelligence artificielle générative. Ce tournant qui se profile est notre plus grande opportunité. Il redéfinira de nouveaux leaders dans tous les secteurs, y compris le nôtre.

Comme professionnels, nous savons que les plateformes à venir vont structurer l’offre touristique. Doit-on considérer qu’elles seront nécessairement le monopole de géants américains comme le sont aujourd’hui toutes les intelligences artificielles génératives comme ChatGPT, Google Bard, Meta AI ou d’autres services comme Midjourney ? Non, je ne le crois pas !

La France, plus largement l’Europe ont le potentiel de développer leur propre alternative. Pour cela, je prône une approche résolument tournée vers l’innovation et le soutien à nos pépites technologiques françaises comme Mistral AI ou le laboratoire Kyutai qui travaillent à bâtir un modèle open source d’intelligence artificielle générative susceptible de rivaliser avec Microsoft, Google, Meta. Mon ambition est de voir émerger une plateforme révolutionnaire "Made in France", un projet à la fois ambitieux et réaliste, développé par une start-up.

Ma proposition est de soutenir activement cette une telle émergence par le biais d’un fonds d’investissement collectif dont notre profession pourrait se doter. Chaque hôtelier, chaque restaurateur pourrait y contribuer aux côtés de nos partenaires naturels.

L’heure est venue de reprendre la main pour défendre notre art de vivre à la Française, promouvoir nos établissements et commercialiser nos offres, valoriser nos territoires, le local et le fait maison. Notre secteur est prêt pour une nouvelle histoire. Le cadre et les moyens sont à construire pour créer une expérience sans précédent, dont nous pouvons être les co-auteurs.

A propos de l’auteur :
Article fourni gracieusement par Thierry Marx, Président confédéral de l’UMIH depuis octobre 2022
 
Parisien d’origine, Thierry Marx est l’un des chefs les plus reconnus de sa génération. Il se forme chez les Compagnons du Tour de France et les meilleurs Chefs français parmi lesquels Claude Deligne, Joël Robuchon et Alain Chapel.
 
Il voyage et travaille en Australie, à Hong-Kong, en Thaïlande et notamment au Japon où il pratique et enseigne les arts martiaux.
 
A son retour en France, il est récompensé́ d’une première étoile Michelin en 1988 au Roc en Val à Tours puis au Cheval Blanc à Nîmes. Il obtient 2 étoiles en 1999 au Relais & Châteaux Cordeillan-Bages dans le Médoc.
 
Top Chef le révèle au grand public à partir de 2010, avant d’intégrer le programme « Master Chef » en août 2022.
 
Les projets continuent de se succéder : Thierry Marx défend une cuisine responsable, alliant plaisir et bien-être, qui ne connait pas de conflit entre la tradition et l’innovation. En 2013, il crée le Centre Français d’Innovation Culinaire à l’université d’Orsay avec le physicien-chimiste Raphaël Haumont et réfléchit sur l’évolution de l’alimentation en orientant les recherches sur les problématiques environnementales et de santé à l’horizon 2050.
 
Un chef engagé : Ardent défenseur de la formation professionnelle, il créé en 2012 Cuisine Mode d’Emploi(s) et offre des parcours d’insertion à des personnes éloignées de l’emploi en les formant gratuitement et en 12 semaines à devenir cuisinier, boulanger ou serveur.
 
Un chef d’entreprise : 2010, c’est l’année de ses débuts dans les cuisines du Mandarin Oriental de Paris, avec ses restaurants Le Camélia et Sur-Mesure by Thierry Marx. En juin 2016, Il lance de nouvelles marques en boulangerie avec Thierry Marx Bakery et ouvre à Tokyo au Japon un restaurant gastronomique Thierry Marx et le Bistro Marx. Il entreprend l’ouverture de plusieurs restaurants dans des lieux de vie : La Plage à l’aéroport de Nice en avril 2016 puis la très célèbre « Madame Brasserie » au 1^er étage de la Tour Eiffel.
 
Pour clore l’année 2022, Thierry Marx est élu président confédéral de l’UMIH en octobre. Début 2023, il ouvre à Paris dans le 8^e, son nouveau restaurant gastronomique ONOR qui symbolise ses engagements pour une cuisine à impact social et environnemental et notamment ses combats en faveur de l’insertion par la formation professionnelle.