Sans nostalgie pour Portishead, la rare Beth Gibbons dévoile sur scène les secrets de son sublime Lives Outgrown, à la beauté orageuse.

C’est une voix unique et poignante qui a profondément marqué l’histoire, en premier lieu avec Dummy de Portishead en 1994, pierre de touche du trip-hop, qui réinventait une soul froide et langoureuse à l’aune des musiques électroniques et du hip-hop. Un art du temps suspendu que la chanteuse n’a cessé de cultiver au fil des ans - avec son groupe ou aux côtés de Rustin Man sur Out of Season - et qui éblouit à nouveau sur son premier véritable album solo paru l’an passé, Lives Outgrown, chef d’œuvre d’une élégance et d’une modernité rayonnantes. Beth Gibbons y déploie une écriture capiteuse, au fil de dix chansons sublimées par des arrangements très singuliers, fruits d’un patient travail sur la texture des sons, la douceur étouffée des percussions, l’expressivité des cordes, la beauté et le mystère des instruments anciens et des trouvailles de toutes sortes. Après une décennie de travail, elle en donne aujourd’hui sur scène des versions à couper le souffle.

Première partie : Bill Callahan

Artisan majeur du folk américain depuis 30 ans, Bill Callahan est tout simplement l’un des meilleurs auteurs compositeurs de sa génération.

Entamée sous le nom de Smog à l’orée des années 1990, la discographie de Bill Callahan témoigne d’une mue étonnante, où les chansons bricolées et tordues des débuts ont fait place à une écriture et des orchestrations plus amples. Fils conducteurs de ce fabuleux parcours, la voix grave et le phrasé si singulier du songwriter se déploient aujourd’hui sur des chansons d’une qualité toute cinématographique, denses et narratives. Sur le somptueux YTI⅃AƎЯ paru en 2022, textes et mélodies se fondent au cœur d’arrangements de cuivres, claviers et cordes mais Bill Callahan peut aussi en éclairer les reliefs et contrastes accompagné d’une simple guitare électrique.