« Culte », aux origines de la téléréalité sur Amazon Prime

par Yaël Hirsch
22.10.2024

Nous ne pouvions pas ne pas nous jeter sur la nouvelle série d’Amazon Prime qui, en 6 épisodes, retrace l’épopée de l’arrivée de Loft Story sur M6. Culte tient fermement son sujet, sans trop d’effets rétro. La série nous fait entrer dans l’univers impitoyable de la télé, à l’heure où elle régnait en maîtresse.

Loft Story dans le rétro

Culte vous parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. 2001. Une boîte de production qui a pignon sur rue, mais a fait de mauvaises affaires joue son va-tout sur l’importation de Big Brother sur M6, une petite chaîne qui monte et aime s’affirmer en poil à gratter de la grande TF1. Sont sélectionné·e·s pour cette aventure : un vieil associé vieille école (Nicolas Brançon), un jeune associé ambitieux (César Domboy), une jeune productrice aux dents qui rayent le parquet, Isabelle de Rochechouart (Anaïde Rozam, impeccable en alias de Alexia Laroche-Joubert) et un jeune journaliste « issu de la diversité » qui devient casteur plutôt que reporter (Sami Outalbali)… C’est alors que surgit le plus beau personnage de cette nouvelle dramaturgie : la bimbo fragile au grand cœur (Marie Colombet d’une élégance folle en Loana). Tout tout tout !, vous saurez tout sur les coulisses de cette version « Tournez-manège » de Big Brother : les foudres qu’elle a suscitées, de la rue au CSA, aussi bien que les passions qu’elle a déchaînées. Avec une BO subtilement nostalgique, deux ou trois rewinds bien amenés comme sur une VHS et les trois personnages principaux bien ciselés, c’est tout une époque que l’on revisite avec gourmandise.

Notre société du spectacle, 25 ans après

Avec un casting parfait de comédien·ne·s qui ont presque tous et toutes un lien avec Instagram, quelques réflexions bien placées sur l’« ère du vide » et la mise en avant d’une jeunesse qui a besoin de se retrouver, la série n’interrompt jamais son rythme endiablé. Elle appelle un chat un chat et un peep-show pareil, mais elle ne juge pas à l’emporte-pièce, elle retranscrit et nous laisse réfléchir. Et quand on joint ce panorama de personnages sacrifiés sur l’autel du rien avec la manière dont « les réseaux » ont amplifié le phénomène tel que reflété dans un film comme Diamant Brut, on se se sent d’autant plus coupable d’avoir regardé d’un trait les 5 heures du programme dans lequel la mise en abyme redouble le vers et le fruit et le voyeurisme. Bien joué ! Attention, on risque d’avoir une saison 2 musicale.